Par Denoual Le Roux

Extrait du livre Haut Potentiel Intellectuel (HPI) en décrochage scolaire

L’adolescence est un âge qui favorise les opinions tranchées, les points de vue les plus arrêtés. L’adolescent HPI va encore plus loin car il dispose de davantage de moyens pour mettre ses actions en cohérence avec ses valeurs et pour faire preuve d’une radicalité, dans son expression comme dans ses actes. De plus, certains d’entre eux rationnalisent à l’extrême et construisent des édifices verbaux qui ressemblent à des forteresses inexpugnables. Souvent, ces constructions rationnelles masquent d’autres réalités émotionnelles, dissimulent une assurance moins grande que les certitudes qu’elles font défiler.

Les adolescents HPI répugnent souvent au compromis. Ils y voient une forme de défaite et de compromission. En cas de conflit, cette disposition peut les conduire à des extrémités parfois dommageables. Il n’est pas rare alors de constater qu’un conflit anodin puisse faire basculer une destinée scolaire.

Face à l’injustice ou à un adulte dépositaire de l’autorité qui se trompe mais souhaite néanmoins imposer son point de vue par la force, des jeunes HPI peuvent refuser toute concession, se bloquer sur leurs positions et ne plus- vouloir en bouger.

Cette posture repose souvent sur une erreur d’analyse. Certains adolescents HPI pensent que le vrai et le juste sont des impératifs catégoriques pour tous, et en particulier pour les enseignants. Or, beaucoup de ceux-ci placent au-dessus de la recherche de la vérité et de la justice la préservation de l’institution, le respect de l’autorité, leur intérêt personnel, ou l’acceptation de la réalité.

Ce malentendu au sujet des fins et des buts, notamment ceux de l’enseignement, est à l’origine de nombreux problèmes pour les adolescents HPI.

Tous les élèves ou presque, hélas, font dans leur scolarité l’expérience d’enseignants qui humilient leurs élèves ou usent de la menace plutôt que de la persuasion pour asseoir leur position en classe. Rappelons que l’autorité s’appuie sur une légitimité que confèrent les aptitudes, la connaissance ou le charisme propre à un individu. Souvent confondue avec l’autoritarisme, l’autorité n’est pas la discipline stricte que l’on parvient à imposer par la force mais la capacité que l’on a de susciter le respect par ses qualités propres. On le sait, les HPI sont souvent peu sensibles à l’autoritarisme alors qu’ils reconnaissent pleinement l’autorité à la condition que celle-ci s’appuie sur des connaissances, des compétences et un réel savoir. Ils ne sont pas tous enclins à considérer les hiérarchies, les statuts ou les positions sociales acquises comme devant faire l’objet d’un respect automatique.

Ils remettent souvent en cause l’autoritarisme, mais respectent l’autorité.

Il est fréquent que les enseignants pensent avoir affaire à des jeunes gens qui discutent leur autorité alors qu’ils n’ont en face d’eux que des adversaires de l’autoritarisme.

Toute la difficulté pour ces jeunes HPI placés dans une situation d’injustice est de ne pas se saboter pour vaincre ce préjudice, de ne pas mettre toute leur carrière scolaire en péril pour la satisfaction de voir le vrai, le bon et le juste l’emporter.

Fort heureusement, ces situations et ces enseignants qui confondent autorité et autoritarisme sont rares. Généralement, les parents qui comprennent leurs enfants les aideront à construire dans la discipline des stratégies d’évitement face à l’enseignant en question. Mais il arrive parfois que les parents aient eux-mêmes connu une expérience de leur propre scolarité et en conservent un vécu douloureux, et qu’ils encouragent alors, même indirectement, leurs enfants à la confrontation.

Il est essentiel que l’élève HPI comprenne que la situation scolaire est une mise en scène, une représentation, et qu’il doit y jouer un rôle. Et que la situation impose qu’il mette son rôle à une distance suffisante pour pouvoir se protéger.

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